2024-01-07 Exclusif : l’ancien directeur du renseignement de la DGSE Alain Juillet à propos des ovnis : “Ce sont des systèmes devant lesquels nos armées sont incapables de répondre”

Tout d’abord interrogé sur la nature même du renseignement, il déclare :  “Le renseignement, c’est quelque chose de factuel, on ne juge pas des émotions, on n’est pas là pour dire c’est bien ou c’est mal, surtout pas ! On est là pour recueillir des faits et les donner aux décideurs. Après, c’est le décideur qui décide, en fonction de la politique, ce qui va dans un sens et ce qui va dans un autre.” 

Q : “La responsabilité retombe-t-elle sur le politique ou sur les services de renseignement ?

Alain Juillet : “Quand c’est de la stratégie politique, cela retombe sur le politique, mais si l’information est fausse, c’est bel et bien le renseignement qui est responsable. Pour qu’il donne des informations, il faut qu’elles restent factuelles. S’il se met à interpréter, il est mauvais.  Il dit “voilà la réalité de ce que l’on voit”. Après, chacun en fait ce qu’il veut; le politique prend la décision finale.”

Concernant les PAN, M. Juillet déclare : 

“Ce qui est terrible avec les objets non-identifiés, objets volants ou autres non-identifiés, c’est que ce sont des systèmes devant lesquels nos armées sont incapables de répondre. On est devant quelque chose que l’on ne maîtrise pas – et c’est très grave, parce que cela veut dire que puisqu’on ne les maîtrise pas ; s’ils sont agressifs, ils peuvent entrer comme dans du beurre. Donc cela pose un problème énorme sur le plan de la sécurité nationale dans tous les pays.” 

“Après la deuxième guerre mondiale, on a eu des informations régulièrement sur des engins et des objets non identifiés, mais à l’époque, on se disait – et ça a toujours été le cas – ‘c’est bizarre’ ; mais ce sont peut-être des témoins qui ont été hallucinés. Néanmoins, déjà à l’époque, il y avait quand même des questions. Quand c’étaient des gens très sérieux – et on en avait, en particulier chez les militaires et les gens de l’armée de l’air – qui vous disaient ‘j’ai vu ça, c’était à côté de mon appareil’, on se demandait, ‘Quand même, ceux-là ne sont pas fous, ils sont sérieux, qu’est-ce que ça pouvait être ?’ Mais, a priori, il n’y a pas eu de problèmes, donc on laissait tomber.” 

“Ce qui se passe depuis 20 ans, c’est que nos systèmes de mesures, nos systèmes d’identification, nos systèmes de repérages, se sont considérablement développés avec les moyens modernes, et on a donc de plus en plus de cas identifiés et vérifiés. On a donc aujourd’hui de plus en plus de cas où l’on dit ‘oui, il s’est effectivement passé quelque chose, et voilà les informations que l’on a pu recueillir dessus’. Cela pose de vrais problèmes, quand le politique pose la question au militaire en lui disant ‘bon alors, et en face de cela, qu’est-ce que vous faites ?’ et que l’autre lui dit ‘mais je ne peux rien faire, car je n’ai aucun moyen de l’empêcher’.”

Image by Andreas Glöckner from Pixabay
Image par Andreas Glöckner de Pixabay

À propos des supposés ballons qui auraient été descendus en février dernier par l’aviation américaine, Alain Juillet note que les États-Unis ont non seulement pris la décision de tirer sur des objets sans les avoir formellement identifiés, mais l’ont fait en violant l’interdiction de descendre des objets à plus de 30 km d’altitude. De plus, aucun commentaire n’a été donné par les autorités américaines concernant la récupération de possibles débris. Il ajoute : 

“Si c’étaient des ballons espions chinois, ils auraient tout de suite sorti l’information en disant : ‘Vous voyez, ce sont des ballons chinois d’espionnage, ils avaient tout un matériel pour filmer’, or, ils n’ont rien dit de tout cela. Ceci prouve qu’en définitive ces ballons n’étaient pas des ballons d’espionnage. Est-ce que c’étaient des ballons météorologiques comme l’ont dit les chinois ? C’est possible – c’est bizarre, mais c’est possible. Est-ce que c’est autre chose ? On n’en sait rien.” 

“Tous les grands pays du monde ont repéré des objets non-identifiés, dans un certain nombre de cas, on a des engins qui ont des caractéristiques de vol qui sont complètement différentes de tout ce que l’on connaît.”

Pour Alain Juillet, la caractéristique la plus intéressante que démontrent ces objets n’est pas le vol en zigzag, mais leur capacité à “rentrer dans l’eau sans ralentir, ils continuent sous l’eau puis ils ressortent. On a un grand nombre de témoignages sur des objets marins non identifiés, des engins qui sont sous l’eau à des vitesses absolument incroyables. Dans les observations d’engins comme cela, on a remarqué que quand ils sortent de l’eau, il n’y a pas de traces d’eau, ils sont comme dans une bulle”.

“Cela rappelle un peu les russes, qui ont une torpille à grande vitesse qui marche comme ça ; on crée une espèce de bulle de plasma autour de la torpille, ce qui fait qu’elle ne se déplace plus dans l’eau, mais dans une bulle qui n’est pas de l’eau, mais du plasma. Ce sont les seuls à savoir faire cela actuellement – et cette torpille est redoutable, mais ce dont on parle ici va beaucoup plus vite. On a des témoignages, et on sait qu’il n’y a pas de pays capables de faire cela aujourd’hui.” 

À propos des observations de tels objets par les forces aéronavales américaines, il ajoute : “Ils n’en parlent pas alors que l’on sait qu’ils ont repéré des PAN à une vitesse extrême sous l’eau – ils ont, paraît-il, un certain nombre de témoignages très intéressants ; mais ils n’en parlent pas. On a des systèmes sous-marins d’écoute pour surveiller les sous-marins nucléaires des autres pays, qui font qu’aujourd’hui, on surveille tout ce qui se passe. Ils ont les moyens de tout repérer, donc à l’évidence, ils ont des informations là-dessus, mais ça, on n’en parle pas – et là, on en revient au secret : comme ils ne savent pas ce que c’est, ils ne veulent pas faire peur aux gens. Il est vrai que si on disait aux gens : ‘Il y a des engins qui traversent la mer, on ne sait pas d’où ils viennent, on ne sait pas où ils vont ; peut-être qu’il y a autre chose sur Terre que nous’, à ce moment les gens paniqueraient ; donc on préfère ne rien dire.”

Image par Andreas Riedelmeier pour Pixabay

L’ancien officier du renseignement français évoque alors une théorie régulièrement évoquée : “les informations que l’on voit filtrer depuis une dizaine d’années des États-Unis seraient une forme de préparation des opinions. ‘Une fois que les gens sont préparés, pourquoi voulez-vous qu’ils s’inquiètent ? Les gens diront ensuite, ‘Mais qu’est-ce que c’est ?’ Et là  tout est possible, mais on entre dans une autre histoire. Pour les services de renseignement, on est factuel ; un service de renseignement ne vous dira pas ‘ça vient d’un autre monde, ça vient d’ailleurs’ ; il dira : ‘Voilà ce que l’on voit aujourd’hui’.”

Alain Juillet aborde alors un sujet controversé : la possible récupération d’engins non-identifiés par l’OGA (Office of Global Access), un bureau de la CIA spécialisé dans les opérations clandestines. “Ces engins, quand ils se sont cassé la figure, soit ils ont eu une panne ou ils ont été détruits, soit ils ont touché le sol à un moment ou à un autre. S’il y a eu des morceaux quelque part, il faut aller les récupérer. Tous les services du monde sont intéressés par la récupération des morceaux, pour plusieurs raisons. 

D’abord parce que dans ces morceaux, on va pouvoir voir les alliages qui sont utilisés ; vu leur ligne de vol et leur comportement, il est très probable qu’ils aient résolu le problème de la gravitation, et donc il y aurait des alliages qui permettraient d’empêcher l’effet de la pesanteur.” 

“Si vous récupérez des morceaux d’engins, ça va vous permettre d’étudier l’alliage, et peut-être on va découvrir que, peut-être, ces alliages peuvent être faits avec des minéraux qui existent sur Terre – ou peut-être aussi que ce sont des alliages avec des choses que l’on ne connaît pas. D’après le témoignage d’un lanceur d’alerte récent auprès du Congrès américain, tout semble indiquer que les États-Unis auraient récupéré des morceaux, possiblement même un engin entier, en Italie, après la guerre.”

“Si eux le font, je pense que nos amis chinois font la même chose, et les russes doivent faire la même chose. Les chinois l’ont reconnu : ils ont un bureau qui travaille là-dessus ; les russes en avaient eux-mêmes parlé il y a quelques années, disant ‘oui, on travaille là-dessus’, parce que sur le plan industriel et sur le plan technologique, cela permettrait de faire des avancées intéressantes, et de commencer à comprendre comment ça marche. Autant dire que pour les industriels de la défense, c’est très, très intéressant.” 

Interrogé ensuite sur l’existence éventuelle d’un tel programme de récupération en France, Alain Juillet déclare ne pas être au courant.  

Photographie par Maël BALLAND

Amené à commenter les propos de l’amiral à la retraite Tim Gallaudet, Alain Juillet les décrit comme un bon résumé de la situation étant donné les faits connus. Gallaudet avait en l’occurrence déclaré : 

« Nous recevons la visite d’une intelligence non humaine dotée d’une technologie que nous ne comprenons pas vraiment et dont les intentions nous échappent également »

Rebondissant sur la déclaration de Christopher Miller, ancien secrétaire à la défense des États-Unis, déçu de ne pas avoir été briefé sur les PAN, Alain Juillet avance une explication : le potentiel technologique d’une telle plateforme militaire serait tel que cela demanderait en effet le plus haut niveau de secret. Or, plus de personnes sont briefées sur un secret, plus les fuites augmentent automatiquement. Il prend alors l’exemple du développement des chasseurs furtifs américains, qui avaient été gardés au plus haut secret durant leurs 10 premières années.

Interrogé sur les réactions possibles des politiques américains lors d’une année électorale face à une opinion publique demandant des réponses sur le sujet des ovnis, Alain Juillet déclare qu’il est possible qu’ils prennent les devants et lâchent des informations : “Des professionnels regarderont ce que l’on peut dire, ce qui posera le moins de problèmes pour la suite.” Il se demande si ce dévoilement d’informations morcelées que l’on a pu voir récemment, n’aurait pas justement pour but de faire baisser la pression populaire. 

Concernant une possible course aux armements de PAN qui se déroulerait entre les grandes puissances, Alain Juillet valide : “Oui, c’est pour cela que tout le monde veut récupérer des morceaux pour en voir des alliages. Tous les pays cherchent une arme de rupture, une arme que les autres ne savent pas arrêter. Le pays capable de construire un PAN aurait un avantage terrible, car cela annihilerait tous les moyens aériens. Les centaines d’avions que peuvent avoir les grands pays – bombardiers, avions de chasse – ne servent plus à rien ; ce serait colossal, une révolution.”  

Au sujet des volontés de conquêtes spatiales affichées par les grandes puissances et du réarmement général en cours, Alain Juillet déclare “aujourd’hui toutes les grandes puissances, y compris la France, ont des systèmes de repérages qui permettent de suivre tous les satellites, tous les lancements, et on les surveille à la centaine de mètres ou au kilomètre près. On surveille tout ; tous les morceaux qu’il y a dans l’espace sont connus. On a une connaissance extraordinaire de ce qui se passe au niveau de l’espace – ce qui pose d’ailleurs un problème, car dans ces conditions-là, comment se fait-il que l’on ne repère pas des engins, des PAN qui pourraient passer par là ? Ratcliffe en a parlé un petit peu, mais personne n’a montré d’images, ou informé de mesures sur les PAN qui auraient été prises au niveau spatial. Et pourtant, il doit y en avoir, forcément, il y en a, puisque l’on en voit au sol, on en voit en altitude ; il n’y a pas de raison que l’on n’en voit pas dans l’espace. Là-dessus, c’est encore un autre problème sur lequel il y a encore beaucoup à dire.” 

Interview :

Image principale Mario Schildermans de Pixabay.

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